Le projet innovant de
la PDSA au CMS de Gennevilliers - Dr Daniel Thiollier, Dr Alain Tyrode
Les
gardes de PDSA (Permanence Des Soins Ambulatoires) existent dans la ville de
Gennevilliers au sein du CMS (Centre Municipal de Santé) depuis le 15 avril
2013, les soirs de semaine, de 20 à 24 heures.
En date
du 20 mai 2015, 39 médecins libéraux et salariés ont
participé aux gardes et ont effectué 2533 consultations.
Ce
système de consultations non programmées de soirée permet à des médecins
salariés de participer à la permanence des soins.
La
permanence des soins correspond en outre pleinement aux missions d’un centre
municipal de santé et favorise ainsi
le développement du tissu médico-social.
Présentation
Les acteurs et les partenaires de la ville de Gennevilliers – à savoir l’ARS
(Agence Régionale de Santé), le Conseil de l’Ordre des Médecins du 92, la CNAM
(Caisse Nationale d’Assurance Maladie), le SAMU 92, les représentants des
services d’urgence du 92, les responsables hospitaliers et les autres membres
du CODAMUPS - TS (Comité Départemental de l’Aide Médicale Urgente, Permanence
des Soins et des Transports Sanitaires) – ont décidé de développer un projet
expérimental sur deux années, approuvé par l’ARS le 4 octobre 2011.
Il
existe deux modes de recours aux
consultations non programmées : un dispositif hospitalier (SAU (Service
d’Accueil des urgences), SAMU, pompiers, Service de Protection Civile) destiné
aux problèmes de santé graves nécessitant des soins lourds, et un dispositif ambulatoire
(Maisons Médicales de Garde (MMG), SOS Médecins) destiné à répondre à la perception de l’urgence ressentie
par le patient, sans menace du pronostic vital à court et moyen termes ;
les deux dispositifs ne se substituant pas l’un à l’autre.
En 2013,
force est de constater que dans le territoire de la ville de Gennevilliers et
des villes avoisinantes, il existe un déficit de permanence des soins
ambulatoires pour une population socio-économiquement vulnérable, ce qui
entraîne obligatoirement un report des patients dans les SAU de proximité (les hôpitaux Beaujon à Clichy, Louis
Mourier à Colombes, Max Fourestier à Nanterre, etc.) et implique un surplus de
consultations hospitalières inadaptées qui dégradent la qualité des soins dans
les services d’urgences.
Le
projet initial faisait intervenir un vigile, une infirmière, un médecin sénior
et un interne SASPAS (Stage Autonome en Soins Primaires Ambulatoires Supervisé)
tous les soirs de semaine de 20 à 24 heures.
Le dispositif ainsi que les horaires ont été modifiés au cours de l’année 2014 : suppression de l’interne
SASPAS (notre activité ne nécessitait pas la présence de deux médecins) et
remplacement de l’infirmière par un agent administratif. Depuis le premier janvier 2015, les
consultations de garde sont ouvertes les dimanches et jours fériés, de 9 à 12 heures.
Nous travaillons en partenariat avec les sapeurs-pompiers
(régulation 18) qui peuvent être amenés à déposer des patients avec l’accord du
médecin de garde. Ceci évite à la fois une perte de temps pour les patients et
les sapeurs-pompiers, l'engorgement des urgences et surtout une diminution de
la perte des chances médicales pour les patients.
Déroulement
Un
patient qui ressent une urgence doit composer le 15. Le médecin régulateur de l’appel évalue sa situation et
l’oriente vers le service le plus adapté pour sa prise en charge. Le médecin peut donner des
conseils téléphoniques et/ou adresser le patient à une maison médicale de
garde, à SOS Médecins, aux urgences hospitalières ou au SAMU. Ce patient peut être dirigé vers le CMS (signalisation par
un panneau lumineux « Consultations non programmées de soirée »). Les patients peuvent
accéder directement à ces consultations, mais les personnels de PDSA les
incitent vivement à composer le 15 pour qu'une ébauche de diagnostic soit posée
et éviter une perte de temps et de chance pour le patient en cas de mauvais
adressage.
Le
patient est tout d’abord reçu par un agent administratif qui enregistre les
droits du patient : il n’y a aucun échange d’argent pendant la garde, les
patients sont invités à revenir régler leurs consultations pendant les heures d’ouverture des
services administratifs. Nous conservons ainsi dans le dispositif d’accueil de
nuit un fer de lance de notre pratique de jour en CMS : le tiers-payant
intégral.
39
médecins libéraux et salariés ont assuré les gardes depuis 2 ans. 20 d’entre eux exercent dans un CMS
(Gennevilliers ou autres), 15 sont des médecins libéraux de Gennevilliers ou de
villes adjacentes et 5 sont des médecins titulaires d’une licence de
remplacement.
Notre
système permet une collaboration fructueuse et égalitaire entre médecins
libéraux et salariés.
Les médecins ont à leur disposition des bandelettes urinaires, des plateaux de suture avec fils
résorbables et non résorbables, un appareil à aérosol, un ECG, un appareil de
radio portatif permettant de faire des clichés de petites articulations, une
valise d’urgence avec défibrillateur, un ambu d’oxygène.
La PDSA s’intègre totalement dans les services de soins
continus des patients puisqu’à chacun est remis un résumé de la
consultation destiné à son médecin traitant.
Activités
Sur 2
ans, du 15 avril 2013 au 15 avril 2015, 2390 consultations ont été effectuées
durant les 520 gardes, ce qui correspond à une moyenne de 4,59 patients par
garde.
Le
ratio hommes/femmes est de 39% / 61%.
Le
ratio adultes/enfants 70% / 30%
La
moyenne d’âge des patients est de 21 ans.
Le
nombre d’actes va croissant depuis l’ouverture des gardes :
-
15
avril - 31décembre 2013 : 538 actes effectués
-
1er
janvier - 31 décembre 2014 : 1294 actes effectués
-
1er
janvier 2015 - 20 mai 2015 : 701 actes effectués
Il est
à noter que depuis 2015, les consultations de garde sont également
ouvertes les dimanches et jours fériés de 9 à 13 heures.
Activités
sur un échantillon de 151 patients en 2013 :
Les
infections ORL représentent 35% des diagnostics, les douleurs abdominales
comprenant les gastro-entérites aigües, 12% ; les traumatismes, 11% ;
les infections respiratoires, 7%. Cet ensemble de pathologies constitue donc
les deux tiers des diagnostics de consultations. S’ensuivent les douleurs
articulaires, qui représentent 5% des diagnostics ; les infections
urinaires et gynécologiques, 4% ; les douleurs thoraciques, 3% ; les
fièvres isolées, 3% ; les anxiétés et angoisses, 2% et les autres pathologies
représentent en tout 18% et
concernent chacune 1 ou 2
consultations.
Sur
l’ensemble de ces consultations, seuls 3 patients ont été ré-adressés aux
urgences, c’est-à-dire 1,9% des cas.
Activités
sur un échantillon de 618 patients en 2014 :
Les
infections ORL représentent 26% des diagnostics ; les douleurs
abdominales, 16% ; les affections dermatologiques, 15% ; les
traumatismes, 9% ; les douleurs autres qu’abdominales (musculaires,
articulaires, thoraciques, etc.), 7%. Cet ensemble de pathologies représente
les trois quarts des consultations. S’ensuivent les infections respiratoires,
qui représentent 6% des diagnostics ; les infections urinaires et
gynécologiques, 4% ; les fièvres isolées, 4% ; les infections
oculaires, 3% et les autres pathologies représentent en tout 10%.
29
patients ont été ré-adressés aux urgences, c’est-à-dire 4,7% des consultations.
Parmi ces 29 patients, 17 étaient destinés aux urgences chirurgicales.
Évolution en cours
-
Est à l’étude une extension
des consultations au samedi après-midi et soir, afin de simplifier la
visibilité des jours d’ouverture de notre service de PDSA par la
population.
-
Un
questionnaire de satisfaction va être lancé prochainement, avec deux
objectifs
principaux : l'amélioration de notre offre médicale et l’identification des raisons pour lesquelles les patients qui viennent en consultations non programmées de soirée n’ont pas consulté leur médecin généraliste. La PDSA ne peut pas et ne doit surtout pas constituer une médecine de suivi. Il est essentiel d’éduquer la population dans ce sens.
principaux : l'amélioration de notre offre médicale et l’identification des raisons pour lesquelles les patients qui viennent en consultations non programmées de soirée n’ont pas consulté leur médecin généraliste. La PDSA ne peut pas et ne doit surtout pas constituer une médecine de suivi. Il est essentiel d’éduquer la population dans ce sens.
-
L’utilisation
d’un module d’extraction de données est prévue, dans le but de récupérer
facilement les diagnostics des
consultations.
Il existe cependant un manque de visibilité quant à la
réduction des actes des services d’urgences que la PDSA assure. En effet, ni l’hôpital, ni l’ARS ne
communiquent de chiffres à ce sujet. Les rencontres avec les services
hospitaliers d’urgences n’ont lieu qu’à l’occasion des réunions CODAMUPS-TS
durant lesquelles de nombreux autres sujets sont évoqués.
Ces
dernières années, il est indiqué que le nombre de passages aux urgences n’a
jamais cessé de croître (augmentation de 36% entre 2000 et 2009).
L’articulation
voulue avec les services d’urgences reste malheureusement très théorique et
trop unilatérale.
Les
médecins de garde contactent les services d’urgence lorsqu’ils ré-adressent les
patients aux urgences, par courrier et/ou contact téléphonique. Notre structure
n’est pas adjacente à une structure hospitalière et il est donc aisé de
comprendre qu’un patient qui se présente aux urgences ne soit pas adressé au
CMS (nécessitant au patient de prendre un véhicule pour venir). Cependant nous
entretenons de très bonnes relations avec les personnels du centre 15 et les
responsables du
SAMU 95 à l’Hôpital de Garches, avec lesquels nous échangeons régulièrement sur nos
activités.
Il existe à l’hôpital une situation paradoxale puisque le
nombre de passages de patients permet, du fait de la tarification à l’acte, de
faire pérenniser les budgets et donc les emplois.
Nous considérons que les patients reçus dans le cadre de la
PDSA auraient majoritairement consulté aux urgences si notre structure
n’existait pas. Il est en outre certain que le coût d’une consultation de PDSA,
même majoré le soir ou les week-ends, est nettement inférieur à celui d’un
passage aux urgences.
Après 2
ans de fonctionnement, notre service expérimental s’est révélé innovant et
efficient : notre activité est croissante, la PDSA montre son utilité
certaine dans les services de soins de proximité, enrichissant ainsi le tissu
médico-social de la ville. Des barrières ont été rompues, les médecins salariés
en collaboration avec des médecins libéraux participent à la PDSA. Forts de
notre expérience concluante, nous espérons vivement la partager avec des
confrères afin que d’autres centres de santé développent à leur tour ce type de
service médical pour les populations vulnérables.